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Les métamorphoses du capital

Date & Heure
jeudi 19 décembre 18 h 00
Lieux
Salle de Conférences

Les enseignants de Sciences Économiques et Sociales et le Lycée Henri-IV vous invitent à la conférence « Les métamorphoses du capital » avec Thomas Piketty autour de son ouvrage Le capital au XXIème siècle.

Professeur à l’École d’économie de Paris et directeur de recherche à l’EHESS, Thomas Piketty est connu pour ses travaux sur les inégalités de revenu et de patrimoine (cf : Les hauts revenus en France au XXème siècle publié en 2001 et L’économie des inégalités en 2004).

Mais, il a également pris part aux débats sur la réforme des retraites et a contribué ensuite, avec Camille Landais et Emmanuel Saez, à la structuration d’un débat fiscal qui n’a cessé de s’actualiser depuis la dernière campagne présidentielle (cf : Pour une révolution fiscale paru début 2011).

Dans son nouvel ouvrage, Le capital au XXIème siècle, il revient sur les inégalités économiques dont il explore la dynamique dans une perspective internationale de très long terme. C’est sur cette dernière publication que s’appuiera la conférence intitulée « les métamorphoses du capital ».

Dans son dernier ouvrage, Thomas Piketty poursuit un travail entrepris depuis des années sur les inégalités économiques et il livre ici une étude vraisemblablement inédite sur une si longue période.

Il mobilise une considérable documentation qui lui permet tout d’abord de suivre de façon multiséculaire et comparative la composition du capital au sens large (englobant le capital productif et le patrimoine), d’en retracer l’accumulation mesurée en année de revenu national, d’en estimer le rendement et d’en évaluer la part dans les revenus des habitants durant ces trois derniers siècles. Au cours de cette première étape, l’auteur montre qu’en atteignant actuellement six années de revenu national, le capital retrouve le niveau relatif qu’il avait perdu dès la fin du premier conflit mondial.

Mais cette courbe en « U » du capital n’est jamais qu’un rapport entre un stock (le capital) et un flux (le revenu national) dont il serait hâtif de déduire un retour de la rente sans une estimation des flux de revenus eux-mêmes engendrés par ce stock de capital. C’est pourquoi, l’auteur évalue le rendement moyen du capital sur cette longue période afin de pouvoir retracer l’évolution de la part des revenus du capital dans le revenu national. Signalons au passage que la fixation d’un rendement moyen du capital sur une telle durée est une tâche ardue puisque ce rendement n’est pas constant ; il faut tenir compte de la composition du capital qui change énormément (dévaluation du patrimoine foncier, évaluation du capital productif, etc…), de la quantité de capital qui joue elle-même sur son rendement (le rendement marginal du capital décroît avec son abondance), des crises, etc… Cependant, une fois tous ces paramètres et variations pris en compte, la courbe représentative de la part des revenus du capital dans le revenu national forme bien, selon l’auteur, une courbe en « U » semblable à la précédente. Autrement dit, le retour du capital, mesurable depuis la fin du vingtième siècle, s’accompagne aussi d’un retour des rentiers de sorte que notre époque renoue avec les sociétés patrimoniales du dix-neuvième siècle. Retour que l’auteur illustre d’ailleurs par des extraits commentés de Balzac qui retrouvent une étonnante actualité ! Ce constat prend évidemment l’exact contre-pieds des travaux de Kuznets qui, effectués au coeur des « 30 glorieuses », dessinaient au contraire une optimiste courbe en « U » inversée longtemps considérée comme une loi d’évolution historique.

Pour important qu’il soit, ce constat du retour de la rente ne livre pas les clefs de la dynamique d’accumulation du patrimoine sur le long terme. Il s’agit ici, en quelque sorte, de se poser la question inverse et, au lieu de se demander comment le patrimoine façonne le revenu actuel, l’auteur se demande alors comment l’affectation du revenu (épargne ou consommation) contribue, années après années, à l’accumulation du patrimoine (entendre aussi bien son accroissement que sa réduction). Comme l’on peut raisonnablement estimer que le capital accumulé résulte du taux d’épargne (part de l’épargne dans le revenu national) et que le revenu national provient de la croissance, alors le rapport entre le capital accumulé et le revenu national s’aligne logiquement, dans le long terme, sur le rapport entre le taux d’épargne et la croissance du revenu. Ainsi, en suivant Thomas Piketty, notre époque pourrait être qualifiée de phase de patrimonialisation du revenu national puisqu’un taux d’épargne relativement élevé accroît le capital (le numérateur) tandis que la faible croissance ralentit la progression du revenu national (le dénominateur). En cela, les vingt dernières années s’opposent à la configuration des « 30 glorieuses » au cours de laquelle l’auteur observe d’ailleurs un rapport bien plus faible entre capital et revenu national.

Reste enfin le lien entre la rente et les inégalités économiques. Le rendement moyen du capital joue bien sûr un rôle important dans cette relation puisque le capital ayant actuellement un rendement net supérieur aux autres sources de revenus (ce ne fut pas toujours vrai), ses détenteurs voient leurs revenus progresser plus rapidement que les ménages qui en sont démunis ou en sont plus faiblement dotés. Mais, c’est surtout le rendement différentiel des diverses variétés de capital qui accentue les écarts car les gros patrimoines, essentiellement composés du capital le mieux rémunéré actuellement (titres mobiliers), bénéficient d’un rendement marginal croissant. Ces valeurs mobilières ne sont évidemment pas sans risques comme l’a démontré la crise de 2008, mais l’abaissement des taux d’imposition marginaux supérieurs a ouvert la voie à une boucle patrimoine-revenu dont l’auteur illustre l’effet « boule de neige » par la progression sans frein des plus grosses fortunes ces dernières années.

Pour finir, Thomas Piketty préconise l’institution d’un impôt international sur le capital qui, même modeste, aurait le mérite de produire de la transparence financière et il recommande, concernant les patrimoines les plus élevés, des taux allant jusqu’à 5% ou 10% dont l’effet serait non négligeable.

Pour retrouver tous les chiffres et graphiques dont cette note est démunie, utilisez le lien suivant :
http://piketty.pse.ens.fr/files/capital21c/Piketty2013GraphiquesTableauxLiens.pdf

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