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Hommage à Julien Gracq

Date & Heure
jeudi 25 mars 20 h 00
Lieux
Lycée Henri-IV

Ancien élève de Khâgne Henri-IV

Julien Gracq aurait eu cent ans le 27 juillet 2010. Le lycée Henri-IV a rendu hommage à celui qui fut élève de sa khâgne de 1928 à 1930.
Cette manifestation s’est déroulée sur trois semaines, du 25 mars au 10 avril 2010.

Le choix a été fait de mettre en valeur l’œuvre de l’écrivain grâce à la contribution des élèves et des professeurs de l’établissement et avec l’aide de l’Association des anciens élèves.

Pendant toute la durée de l’hommage ont été exposées les œuvres de Julien Gracq dans les bibliothèques du lycée, le texte des Eaux étroites et des photographies de l’Evre dans le hall de la salle des conférences.
Ont d’abord été projetés des films tirés d’œuvres de Julien Gracq, suivis de débats : Rendez-vous à Bray d’André Delvaux, Un Balcon en forêt de Michel Mitrani.
La soirée « À la rencontre de Julien Gracq » a permis, après la projection du film de la série « Un siècle d’écrivains » consacré à Julien Gracq, de recueillir les interventions de Bernhild Boïe, Régis Debray, Jean-Paul Dekiss, Françoise Dumas, Bertrand Fillaudeau et Philippe Le Guillou.
L’hommage s’est poursuivi par une soirée de lectures de textes de Julien Gracq par des élèves du collège, du lycée et des classes préparatoires dans l’ancien cellier de l’abbaye.
Il s’est achevé le 10 avril par la représentation de scènes du « Roi pêcheur », par l’Atelier théâtre du lycée et l’inauguration de la salle Julien Gracq, une des salles historiques du lycée, ancienne chapelle privée de l’abbé. Celle-ci abrite désormais deux photographies de Julien Gracq prises par Robert Doisneau en 1985, généreusement offertes au lycée par la famille de Robert Doisneau, ainsi que le fac-similé du texte de Julien Gracq « Familiarité du livre », que l’auteur avait donné à l’Association des anciens élèves du lycée Henri-IV, à l’occasion de l’hommage que l’association lui avait rendu pour ses quatre-vingt-dix ans.

Discours prononcé lors de l’hommage rendu à l’écrivain par Madame Bernilde Boïe, légatrice testamentaire de Gracq

L’écrivain que nous honorons aujourd’hui n’aimait pas les honneurs. Il a commencé très jeune à se méfier de tout ce qui était cérémonie officielle. Voici comment l’élève de cinquième voit Georges Clemenceau en visite à son lycée : « Je puis dire que cette tache noire et suprêmement insolente, tapotant ses genoux du bout des doigts pendant que péroraient préfet, recteur et généraux, a dégonflé pour un enfant de douze ans en une minute de son prestige l’officiel aussi brutalement que la pointe d’une épingle dégonfle une baudruche. » Deux ans après, la lecture de Le Rouge et le Noir complétera cette rébellion contre le convenu, contre tout ce qui était donné « pour recommandé ».
Il faut dire qu’avant sa venue à Paris, son expérience du lycée n’avait pas été très heureuse. On oublie souvent cette longue période de sept années, mais il faut s’y arrêter un instant pour comprendre le bouleversement qu’allait constituer son arrivée à Henri-IV. A Nantes, l’anonymat gris des lieux, la promiscuité, la claustration de l’internat, le caporalisme disciplinaire vont marquer l’adolescent et laisser des traces dans l’oeuvre de l’écrivain, sous forme de récits, d’anecdotes et, plus profondément, dans cette tension entre monotonie et désir, absence et présence de la vie dont est faite la courbe de ses romans. Dans un entretien, il déclare : « la littérature et la géographie figuraient, dans la journée grise et misérable de l’internat, à peu près les seules éclaircies : j’avais tendance à les accueillir comme de l’eau fraîche ». Dans tout ce qui est vie de l’esprit, ce lycéen solitaire sera d’ailleurs un élève hors pair : prix d’excellence dans presque toutes les matières, plusieurs prix au Concours général, mention très bien au bac. Un élève toutefois un peu singulier et dans ses devoirs – pieusement conservés dans la famille – les professeurs lui trouvent parfois quelques extravagances. Au garçon de douze ans on reproche ainsi trop d’audace dans les comparaisons comme dans cette narration sur l’automne :

« Je rentrai à la maison, rempli de cette poésie si mélancolique de l’automne qui s’exhale des sous-bois en pleurs, jaunis et brumeux et pénètre celui qui passe, comme la fumée légère des parfums d’Orient brûlant dans des cassolettes. » Parfois encore on critique une accumulation d’adjectifs quand il évoque une promenade dans la campagne : » Un radieux soleil de juin inondait de ses chauds rayons les près verdoyants. Un quart de siècle plus tard Maurice Blanchot va montrer comment ce « défaut » devint une qualité essentielle de sa prose.

Il n’empêche : l’école républicaine demeure fidèle à sa mission de ce qu’on appelle aujourd’hui l’ascenseur social et les professeurs du lycée viennent persuader la famille Poirier d’envoyer leur fils dans un grand lycée parisien.

L’arrivée à Henri-IV marquera ainsi un tournant dans sa vie. À l’internat de Nantes, l’élève Poirier s’était installé dans une « paisible et silencieuse insurrection intellectuelle », à Paris il trouvera dans les enseignements et échanges d’une khâgne réputée – déjà –comme la plus libérale et la plus ouverte de la capitale, enfin exprimé à haute voix ce que jusqu’ici il n’avait pensé que tout bas. Il y écoutera les leçons d’Alain, dont il dira plus tard qu’il fut pour lui « un admirable éveilleur ». Il est frappé par son extraordinaire virtuosité dans l’improvisation. Mais, plus décisif encore, Alain, pour qui il n’existait pas de barrière entre la philosophie et la littérature, lui fait par cette approche aimer la philosophie. Dans le château d’Argol, l’impressionnante liste des lectures philosophiques d’Albert relève d’un savoir qui suit d’assez près cet enseignement. En khâgne, il va aussi rencontrer des camarades venus de toute la France dont certains deviendront ses amis, tel Francis Léaud qui lui fera connaître les mouvements littéraires qui agitent Paris. Ce Paris ne sera plus la ville dont rêve un reclus, mais la cité de toutes les aventures intellectuelles sur laquelle les portes de l’internat sont désormais grandes ouvertes. Gracq partage ses dimanches entre cinéma d’avant-garde et matchs de football au stade Buffalo ou à Colombes. Le 28 janvier 1929, la Sainte-Charlemagne est fêtée au lycée par une sortie au spectacle. Entre Borodine et Wagner, Gracq choisira au hasard Parsifal. L’opéra de Wagner sera et restera pour lui « une source inépuisable d’orgie émotive », et l’une des découvertes qui vont marquer l’œuvre à venir. Au château d’Argol, Le roi pêcheur s’en souviendront et Un balcon en forêt s’ouvre sur les premiers vers de l’opéra.

De ses deux années de khâgne, Gracq se souviendra comme des plus enrichissantes de ses années de lycée et de Henri-IV comme d’un lieu du « gai savoir ».

On serait tenté de s’en tenir à ce tableau idyllique. Mais dans la réalité il faut compter avec l’Histoire dont l’ombre commence à s’étendre sur la France et va planer sur toute l’œuvre à venir. Toujours, le souvenir de Gracq revient au climat de cette époque. À sa visite à la Tate Gallery en 1929 il est frappé par un tableau de Watteau sur lequel règne « la nuit du pressentiment qui change un ciel parfaitement bleu en ciel d’orage.» La vision reviendra bien plus tard dans un entretien avec Régis Debray :
« On a vu l’orage grandir, pendant dix ans. (…) Quand, en 1930, il y a eu cent vingt députés nazi au Reichstag, les gens ont compris qu’il se passait quelque chose. On avait l’impression de glisser sur la pente d’un toit. C’était étrange. » Mais c’est sans doute dans un passage de En lisant en écrivant qu’apparaît le plus clairement l’influence que ces années ont eue sur la sensibilité et l’œuvre de l’écrivain et que se dessine la pente de l’imaginaire qu’elles ont creusée :
« J’avais vingt ans quand l’ombre du mancenillier commença à s’allonger sur nous : (…) La montée de l’orage dura neuf ans, un orage intolérablement lent à crever, tellement pesant, tellement livide à la fois et tellement sombre (…) qu’on pressentait qu’une telle nuée d’apocalypse ne pouvait plus se résoudre en grêle, mais seulement en pluie de sang et en pluie de crapauds. (…) Il y a dans l’Histoire un poète puissant et multiforme, et la plupart du temps un poète noir, qui à chaque époque prend pour l’écrivain un visage neuf (…). »De ses deux années de khâgne, Gracq se souviendra comme des plus enrichissantes de ses années de lycée et de Henri-IV comme d’un lieu du « gai savoir ».De ses deux années de khâgne, Gracq se souviendra comme des plus enrichissantes de ses années de lycée et de Henri-IV comme d’un lieu du « gai savoir ».

L’expérience, le climat de l’époque et ses contradictions sous-tendent l’œuvre de leurs tensions aiguës. Menaces et promesses confuses, bonheurs et angoisses de l’attente, exaltation et dégrisement du désir, tiennent en éveil et inquiètent chaque livre.

J’aimerais qu’en entrant dans de cette salle que nous dédions aujourd’hui au souvenir de Julien Gracq, nous allions à la rencontre non pas « d’un classique intemporel »– étiquette qu’on lui applique si volontiers – mais d’un écrivain, qui toute sa vie, est resté de façon singulière et imprévisible en prise directe sur notre temps. Le Rivage des Syrtes est lié à l’expérience de la guerre tout autant qu’Un balcon en forêt ou Le roi Cophetua. Et un lecteur attentif trouve dans les essais et proses brèves de quoi se faire une idée assez précise et complète des réalités du siècle.

Cette salle porte le nom d’un prosateur pénétrant et sensible.
D’un contradicteur tranquille qui raille malicieusement tous ceux qui se fient trop aveuglement aux vérités établies, tout ce qui croit pouvoir régenter la pensée.
D’un promeneur géographe qui ne se lasse pas de parcourir les chemins de ce monde et pour qui la terre envers et contre tout reste « habitable ». D’un poète enfin, qui tout en restant pleinement conscient de la force opiniâtre avec laquelle le monde résiste aux tentatives d’investissement de la poésie, a toujours cru dans l’acte d’écrire.

Discours de Monsieur Escoube, Président de l’Association amicale des anciens élèves du lycée Henri-IV

«Ce qui enhardit les célébrations de centenaires : n’importe qui peut faire ami avec vous».

Le propos de Gracq, lu jeudi par Alice Gardel, élève au Lycée, interroge avec ironie et rendrait hésitant sur le sens d’une telle célébration, alors même qu’ Henri IV pourrait aussi fêter, cette année, le bicentenaire d’un autre ancien, celui d’Alfred de Musset.

Ma première visite à Julien Gracq doit dater du début des années 60, à son domicile, dans une bâtisse provinciale, rue de Grenelle, où, justement, avant lui, avait vécu Alfred de Musset.

Adolescent, je venais de découvrir l’auteur de La Chanson de Barberine, et devais sans doute à cette découverte d’ accompagner alors mon père chez l’écrivain dont il avait été le condisciple, rue Clovis, dans la classe d’ Alain.

Louis Poirier a dit sa vénération et sa reconnaissance, son admiration quasi religieuse, pour Alain, critique libre et aéré… Par ailleurs Henri-IV offrit en 1929 une place au jeune khâgneux, pour aller entendre, et découvrir, un soir, Wagner et Parsifal….

D’autres, mieux que je ne pourrai le faire, diront, dans un instant, ce que doit notre littérature à l’auteur du Rivage des Syrtes.

Au lycée, notre Association a déjà rendu hommage, pendant trois jours, en 2000, à l’écrivain, certes, à l’homme aussi, un homme intransigeant, discret, fidèle, et d’une grande courtoisie, comme pourraient, par exemple, en témoigner ses divers visiteurs à Saint-Florent-le-Vieil.

Rien en 2000, Monsieur le Proviseur, n’aurait pu se faire, sans votre accueil, vos encouragements, votre concours…

Un hommage pour lequel Julien Gracq accepta de donner un texte inédit à notre Association, Familiarité du livre, le dernier texte, peut-être, à avoir été publié de son vivant. Merci, Mme Boie, d’en avoir permis la reproduction dans l’ancien oratoire de l’Abbé qui, dans un instant, va prendre le nom de Salle Julien Gracq.

Un hommage non pour «faire ami» mais pour mieux faire connaître l’homme et son oeuvre, pour dire notre admiration, la transmettre peut-être, et la partager en tout cas, selon notre vocation, notamment avec les plus jeunes. Une khâgneuse, je m’en souviens, accepta spontanément, en 2000, de rendre compte de ces trois jours dans le bulletin de notre Association.

Transmettre discrètement, à son image, et partager … La célébration qui nous réunit ce soir est due à M. Corre, à la persévérance dévouée de M. Chevallier, à M. Kapp, au Lycée, à ses professeurs et à ses élèves, à leur enthousiasme et, pour notre Association, à la compétence et à la disponibilité constante de Mme Berne. Qu’ils en soient, toutes et tous, ici, grandement félicités et remerciés.

Une célébration, M. le Proviseur, que vous avez souhaité préparer, pour ce centenaire, en priorité avec et grâce aux élèves, de la sixième à la Khâgne. La soirée de jeudi, notamment, permit l’expression d’une culture authentique et vivante qui vint répondre, de la façon la plus heureuse, à nos espérances nées de notre première initiative, il y a dix ans, pour les quatre-vingt dix ans de l’écrivain.

Ainsi le Lycée, fidèle, lui aussi, à sa vocation, contribue heureusement à ce centenaire, déjà célébré en France par différentes initiatives, à Toulouse, à Nice, à Nantes qui marquent l’émergence, ici et là, d’une Société secrète des lecteurs de Julien Gracq.

Encore un mot…

Chaque année, sur votre proposition, M. Corre, notre Association, reconnue d’utilité publique, remet plusieurs prix à des élèves du Lycée, sous la forme d’un livre qu’il appartient alors à chaque lauréat de choisir.

En 2009, sans concertation entre eux, chacun des lauréats avait souhaité et demandé un volume de Julien Gracq dans la collection de la Pleïade.

Nous nous réjouissions de cette adhésion comme de ce partage, entre les générations, autour de Julien Gracq, de sa conception de la littérature et, à travers le temps, des questions qu’il pose sur sa respiration…

J’évoquais, en commençant, Alfred de Musset.

En recevant ces prix, l’an dernier, avec cette approche et cette familiarité du livre, chaque lauréat, à propos de Gracq, songeait-il alors, avec nous, à ses deux vers :

«Et nous nous souvenons que nous marchions ensemble que l’âme est immortelle, et qu’hier c’est demain».

Julien Gracq et le lycée Henri-IV

Discours prononcé par le Proviseur du Lycée Henri-IV M. Patrice Corre, lors de l’hommage rendu à l’écrivain le 10 avril 2010

Rendre hommage à Julien Gracq en 2010 l’année de ses 100 ans n’a rien de vraiment original. Du reste il n’y avait rien de plus normal, qu’on ait à cœur de mettre à l’honneur celui qu’on reconnaît comme un écrivain majeur de notre temps, le dernier des grands classiques, comme on a pu l’écrire.

Rien de plus naturel, au sein du Lycée Henri-IV, notre établissement, qui accueillit à l’automne 1928, en classe d’hypokhâgne, le jeune bachelier nantais du Lycée Clemenceau, Louis Poirier, lequel rejoignit deux ans plus tard la rue d’Ulm, sortant de la Khâgne où enseignait Alain.

Du reste, voici bientôt dix ans, à l’automne 2000, Julien Gracq était déjà à l’honneur en ces murs. Grâce à l’association des anciens élèves dont le Président, François Escoube, et les membres du bureau me parlèrent dès notre première rencontre, le jour où j’étais venu prendre contact avec ma collègue Odette Christienne dont je prenais la succession à la direction du Lycée.

Il s’agissait alors d’honorer Julien Gracq à l’occasion de son 90ème anniversaire.
Fidèle à sa ligne de conduite il n’était pas venu en personne, mais il avait pourtant été bien présent tout au long de cette semaine de novembre au cours de laquelle avait été jouée le Penthésilée de Kleist qu’il avait traduit, avaient été lus ses textes par un groupe prestigieux d’anciens élèves (Denis Podalydès), accompagnés au piano par Anne Queffélec. Une semaine qui s’était terminée dans le Grand Amphithéâtre de la Sorbonne par les conférences de Daniel Oster, Yves Lacoste et Philippe Le Guillou.

Présent, il l’avait été plus encore par le magnifique texte qu’il adressa à l’Association des anciens « Familiarité du Livre » que nous allons retrouver cet après midi.

Quelques jours plus tard, il ne manqua pas de m’adresser un petit mot très touchant et plein de délicatesse.

Il confirmait ainsi par ces gestes, son attachement à ces lieux qui furent pour lui très marquants et dont il parle dans Lettrines où il évoque « les hautes voûtes du lycée Henri-IV ».

Terminant son propos par ces mots : « si la vie devait un jour se retirer de Paris, il me semble toujours que c’est là, et nulle part ailleurs, que les premiers brins d’herbe perceraient entre les pavés ».

C’était pour lui dans un temps qu’il comparait à un « jardin fragile, tout éventé d’avenir »

Cependant, 3 ans après sa disparition, n’était-il pas risqué d’organiser, pour le centenaire de sa naissance, un nouvel hommage ? Un hommage parmi tant d’autres ? Un xième hommage ? Un type de manifestation peu fidèle à sa posture, lui qui a toujours refusé les prix et les honneurs, lui qui a dénoncé de la manière la plus cinglante les travers de notre société du spectacle ?

Julien Gracq s’est toujours défié des manifestations publiques autour d’un auteur, préférant de loin la « ferveur réelle » de ses lecteurs aux vanités tapageuses de la réputation. Pour lui, seuls comptaient les œuvres et ceux qui s’y attachent.

De cela le groupe, qui s’est constitué pour conduire l’organisation de cet hommage, avait bien conscience. C’est ainsi que, dès notre première réunion de septembre dernier, Jean Yves Chevalier qui a bien voulu assurer avec moi la coordination, nos collègues Sylvie Guichard, Marie Anne Charbonnier, Cécilia Suzzoni, Martine Leloup, Daniel Oster et Claude Richebourg, Mauricette Berne de l’association des anciens élèves et Jean François Capp, nous avons choisi délibérément de mettre en valeur l’œuvre de Julien Gracq et de confierer à nos élèves la part la plus active.

Un parti pris qui a reçu très spontanément le soutien de Madame Bernilde Boïe, légatrice testamentaire de Gracq dont elle a dirigé la publication des écrits, dans la prestigieuse collection de La Pléiade. Une marque de confiance qui nous a beaucoup touchés et dont je tenais, au nom de tous à la remercier très chaleureusement.

Depuis deux semaines, notre lycée a donc mis en avant l’oeuvre de Julien Gracq :

  • des films inspirés par ses récits lors des premières soirées des 25 et 30 mars ;
  • des propos tenus sur ses écrits lors de la table ronde qui réunissait mardi dernier, à la suite de la projection du film documentaire de Michel Mitrani et de Françoise Dumas, « un siècle d’écrivains » ; outre Bernilde Boïe et Philippe Le Guillou, Jean Paul Dekiss, Bertrand Fillaudeau, Françoise Dumas et Régis Debray.
  • des lectures d’extraits de ses textes jeudi soir, sous les voûtes de l’ancien cellier.

Des moments qui ont offert à tous l’expérience d’une voix singulière, d’un « timbre original ».

Dans cet esprit de fidélité aux déclarations de l’auteur, nous avons renoncé à une commémoration compassée, trop guindée, trop convenue. Nos élèves, de la 6ème à la Khâgne ont montré que Gracq, pour exigeante que soit son œuvre, est accessible aux âges les plus divers. Ils ont fait preuve de réels talents, travaillé avec goût, et, encouragés par leurs professeurs, un remarquable enthousiasme. Au total, un hommage rendu pour les élèves et par les élèves.

Nous avons aussi pensé à des approches diverses de l’œuvre de Julien Gracq d’où la présentation de ses livres, par nos collègues documentalistes avec le concours de la maison Corti, dans nos bibliothèques ; d’où l’illustration des « Eaux étroites » par des photos prises sur l’Evre par Jean Yves Chevalier.

Cette célébration témoigne enfin de notre désir de transmettre une culture authentique, fondée sur la fréquentation des grands textes. Une approche conforme au projet pédagogique de notre lycée où nous nous attachons à prolonger un enseignement exigeant par des activités telles que des conférences, des projections de ciné-club, des concerts, un concours de nouvelles, associant les ressources de l’écrit, de l’oral et de l’audio-visuel, dans un constant souci d’enrichissement pour tous. Pour tout dire une volonté permanente de transmettre le goût d’une culture vivante.

Point d’orgue de cet hommage, cet après midi préparée avec soin, comme les précédents moments, par nos personnels techniques dont M. Palamidis procède du même esprit. Elle s’ouvrira par la présentation d’extraits du Roi pêcheur, assurée par les élèves de l’atelier théâtre dirigé par Jean François Capp. Nous enchaînerons par l’audition d’entretiens avec l’écrivain, puis, après la visite de l’exposition de la rotonde, et les allocutions de Monsieur Le Guillou et de Madame Boïe, nous donnerons officiellement le nom de Julien Gracq à l’ancien oratoire de l’abbé, dénommé jusqu’ici bien tristement Salle 43 !…Une cérémonie dont nous garderons la trace grâce à la caméra de Nicolas Slomka, et qui nous verra dévoiler deux panneaux réalisés par M. Chamroux à partir de photos de Robert Doisneau aimablement et gracieusement mises à notre disposition par ses filles.
Nous ferons ainsi de l’écrivain un « genius loci » certainement bienveillant et tutélaire pour ses jeunes condisciples qui pourront goûter à la qualité de sa prose finement ciselée et auquel nous souhaitons tous de s’inspirer de sa « liberté grande ».

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